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La bactérie SFB et sa capacité à nous protéger des infections

Le dialogue de notre organisme avec le microbiome intestinal est un élément essentiel à notre santé qui débute à la naissance et perdure toute la vie. Une période clé est celle du sevrage, durant laquelle le nouveau-né diversifie son alimentation, permettant ainsi à de nombreuses nouvelles espèces microbiennes de coloniser son tube digestif. Parmi ces nouveaux arrivants, une espèce bactérienne a retenu plus particulièrement l’attention des chercheurs ces dernières années : la bactérie segmentée filamenteuse (ou SFB).

Identifiée dans l’intestin de nombreuses espèces invertébrées et vertébrées (Termites, Truites, Rongeurs, Cochon, Primates, Homme) cette bactérie possède la particularité de s’accrocher aux cellules de l’intestin, induisant alors un fort signal au système immunitaire 1–6. Bien que notre système immunitaire soit programmé pour alerter tout l’organisme en cas de rencontre imprévue, cet accrochage dans l’intestin ne déclenche ni maladie, ni fièvre chez les sujets sains. Au contraire, des recherches ont montré chez les rongeurs que cette bactérie participe à renforcer le tonus immunitaire permettant notamment de préparer les défenses de l’organisme et d’augmenter ainsi la résistance aux infections bactériennes3.

Très récemment, des chercheurs de différentes équipes ont pu mettre en évidence que la SFB est même capable d’induire un signal puissant qui protège et/ou guérit des colites causées par des virus7-7b. Ces travaux de recherche menés sur des souris rendent compte de l’importance que certaines espèces bactériennes du microbiome pourraient avoir chez l’homme lors d’infections intestinales causées par des virus. L’une de ces recherches porte notamment sur l’effet protecteur de la SFB contre le rotavirus qui représente une cause majeure des épidémies de gastroentérite dans le monde. Il affecte en moyenne 140 millions de personnes chaque année, touchant particulièrement les jeunes enfants et causant près de 500 000 morts par an dans le monde (Source INRS- ANSES). Les mécanismes par lequel la SFB agit contre ce virus ne sont pas complètement élucidés, mais sembleraient impliquer le renouvellement accéléré de la couche de cellules qui bordent la lumière intestinale, appelées cellules épithéliales intestinales. L’implication de ces cellules dans les phénomènes de résistance à l’infection par ce virus, n’était jusqu’à ce jour pas documentée. Ces recherches bien que préliminaires, ouvrent vers de nouvelles pistes de traitement préventif et/ou curatif chez l’homme contre les infections à rotavirus pouvant impliquer le microbiome. Il faut néanmoins rester prudent car la présence de la SFB dans l’intestin de rongeurs a également été associée à des pathologies auto-immunes comme l’encéphalite et l’arthrite8,9. Des recherches complémentaires sont donc nécessaires pour comprendre comment exploiter l’effet protecteur de certaines espèces du microbiome comme la SFB contre des infections tout en limitant les dommages collatéraux d’une réaction immunitaire excessive ultérieure 10.

Bibliographie

1.   Klaasen, H. L. B. M. et al. Intestinal, segmented, filamentous bacteria in a wide range of vertebrate species. Lab. Anim. 27, 141–150 (1993).

2.   Gaboriau-Routhiau, V. et al. The Key Role of Segmented Filamentous Bacteria in the Coordinated Maturation of Gut Helper T Cell Responses. Immunity 31, 677–689 (2009).

3.   Ivanov, I. I. et al. Induction of Intestinal Th17 Cells by Segmented Filamentous Bacteria. Cell 139, 485–498 (2009).

4.   Schnupf, P. et al. Growth and host interaction of mouse segmented filamentous bacteria in vitro. Nature 520, 99–103 (2015).

5.   Prakash, T. et al. Complete Genome Sequences of Rat and Mouse Segmented Filamentous Bacteria, a Potent Inducer of Th17 Cell Differentiation. Cell Host Microbe 10, 273–284 (2011).

6.   Yin, Y. et al. Comparative analysis of the distribution of segmented filamentous bacteria in humans, mice and chickens. ISME J. 7, 615–621 (2013).

7.   Bolsega, S. et al. Composition of the Intestinal Microbiota Determines the Outcome of Virus-Triggered colitis in Mice. Frontiers in Immunology 10, 1708 (2019)

7b. Shi, Z. et al. Segmented Filamentous Bacteria Prevent and Cure Rotavirus Infection. Cell 179, 644-658.e13 (2019).

8.   Teng, F. et al. Gut Microbiota Drive Autoimmune Arthritis by Promoting Differentiation and Migration of Peyer’s Patch T Follicular Helper Cells. Immunity 44, 875–888 (2016).

9.   Lee, Y. K., Menezes, J. S., Umesaki, Y. & Mazmanian, S. K. Proinflammatory T-cell responses to gut microbiota promote experimental autoimmune encephalomyelitis. Proc. Natl. Acad. Sci. 108, 4615–4622 (2011).

10. Flannigan, K. L. & Denning, T. L. Segmented filamentous bacteria-induced immune responses: a balancing act between host protection and autoimmunity. Immunology 154, 537–546 (2018).

Auteurs

Dr. Emelyne LECUYER

Dr. Julien VERDIER