Il semble que la consommation d’aliments transformés, caractérisés notamment par la présence d’additifs, ait un impact délétère sur notre microbiote intestinal. En effet, une étude examinant des agents émulsifiants (carboxyméthylcellulose et polysorbate 80) chez des rongeurs a montré qu’ils avaient un impact néfaste sur le microbiote intestinal et sur l’interaction de ce dernier avec la muqueuse intestinale…
En effet, les travaux de Benoît Chassaing et Andrew Gewirtz (Nature, 2015) ont mis en évidence que les agents émulsifiants, ajoutés dans de nombreux produits alimentaires transformés afin d’améliorer leurs textures et de prolonger leurs durées de vie, peuvent modifier la composition et la localisation du microbiote intestinal, conduisant à une inflammation chronique à l’origine de syndrome métabolique et de maladie inflammatoire chronique de l’intestin.
Les maladies inflammatoires chroniques de l’intestin (MICI comprenant la maladie de Crohn et la rectocolite hémorragique) sont des maladies sévères et invalidantes touchant plusieurs millions de personnes à travers le monde. Le syndrome métabolique désigne quant à lui l’ensemble des problèmes liés à l’obésité, et est considéré comme un état précurseur de maladies sévères telles que le diabète de type-2, les maladies cardiovasculaires et les pathologies hépatiques. La forte augmentation de ces maladies a eu lieu malgré une génétique stable, ce qui suggère un rôle primordial joué par des facteurs environnementaux, selon le chercheur Benoît Chassaing.
L’ajout d’agents émulsifiants dans les aliments transformés corrèle avec l’évolution de ces maladies depuis le milieu du 20ème siècle, et il avait été précédemment observé que ces additifs favorisaient la translocation de certaines bactéries à travers les cellules épithéliales intestines. Les travaux de Benoît Chassaing et Andrew Gewirtz démontrent un impact majeur de ces additifs alimentaires sur les fonctions du microbiote intestinal, conduisant à l’apparition de maladies chroniques. La poursuite de ces recherches est en train de mettre en évidence que tous les microbiotes n’ont pas la même sensibilité aux effets pro-inflammatoires des agents émulsifiants, certains microbiotes étant moins impactés que d’autres. Des études complémentaires sont en cours pour mieux comprendre ces différences, ainsi que les mécanismes sous-jacents liés. Enfin, plusieurs essais sont en cours chez l’homme afin de déterminer l’impact de ces additifs sur la santé humaine.
D’autres additifs alimentaires font actuellement l’objet de recherche, et il a par exemple été observé que les édulcorants artificiels non caloriques (la saccharine, le sucralose et l’aspartame) entraînaient une intolérance au glucose lorsqu’administrés aux rongeurs, via un mécanisme impliquant ici aussi le microbiote intestinal. Des données s’accumulent également sur la maltodextrine, polysaccharide utilisé comme additif, avec un impact sur le microbiote et la promotion d’inflammation intestinale. Ainsi, plusieurs additifs caractéristiques des aliments transformés nuiraient à la bonne santé de notre microbiote intestinal, favorisant le développement de maladies chroniques.
Le microbiote intestinal est composé de plus 100 000 milliards de micro-organismes qui est spécifique à chaque individu, et les recherches futures devraient être en mesure de mieux définir le régime alimentaire optimal et personnalisé pour améliorer le microbiote et la santé de chacun.