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Dans cette nouvelle ère post-industrielle, de nombreuses recherches documentent l’appauvrissement des écosystèmes, dont celui de notre propre microbiome. Les conséquences de cet appauvrissement en santé humaine sont nombreuses, puisque de multiples études associent cette perte de diversité microbienne au développement de nombreuses maladies chroniques comme, les maladies métaboliques, les cancers et les maladies neurodégénératives. 

Les nouveaux enjeux en médecine humaine s’attachent donc désormais à intégrer la nouvelle variable qu’est la composition microbienne. 

L’étude des interactions du microbiote avec son hôte, a permis d’identifier les principaux facteurs susceptibles d’agir sur la composition et les fonctions de ces microbes. Parmi les paramètres identifiés figurent en tête la nourriture que l’on consomme et notamment l’apport en fibres alimentaires variées*, substrats nutritifs essentiels pour bons nombres de nos microbes. 

Dans une étude récente publiée dans le prestigieux journal Cell, les chercheurs ont souhaité savoir si la supplémentation en fibres alimentaires ou bien en aliments fermentés pouvaient différentiellement modifier la composition microbienne et influencer conjointement le système immunitaire, clef de voûte dans l’initiation et le maintien du bon dialogue entre l’hôte et ses microbes. Pour cela, ils ont demandé à des personnes volontaires adultes en bonne santé de consommer pendant 14 semaines une diète enrichie en fibres ou bien une diète enrichie en produits fermentés*. Les suivis avant, pendant et après cette intervention nutritionnelle ont permis d’observer que ces deux types de supplémentations impactaient de façon bénéfique les microbiomes des individus mais de différentes manières. 

Les personnes ayant doublé leurs apports en fibres alimentaires n’ont pas vu de modification de leur diversité microbienne en revanche, certaines fonctions microbiennes, ont été modifiées. En effet, leur capacité enzymatique d’assemblage ou de dégradation des sucres complexes et des polysaccharides ou CAZymes (Carbohydrate-active enzymes), a augmenté significativement, un résultat concordant avec ce qui a déjà été observé lors d’une supplémentation en fibres. 

L’autre groupe supplémenté en produits fermentés, a vu sa diversité microbienne augmenter de façon significative. L’étude précise de l’identité des microbes nouvellement installés suggère que la consommation en produits fermentés induit, après plusieurs semaines de supplémentation, l’établissement d’un nouvel écosystème microbien, indépendant des microbes présents dans les produits fermentés. Cet effet bénéfique a pu être associé à une baisse de marqueurs circulants de l’inflammation comme la cytokine IL-6, impliquée dans diverses pathologies chroniques. 

L’analyse de l’ensemble des données récoltées a permis d’observer que l’abondance des activités CAZymes microbiennes est associée à une plus faible concentration de marqueurs protéiques inflammatoires chez l’hôte. Le suivi des activités CAZymes microbiennes en association avec le suivi des marqueurs inflammatoires pourraient alors permettre d’évaluer l’efficacité d’une intervention nutritionnelle sur le rétablissement des interactions bénéfiques entre l’hôte et ses microbes.

Ces résultats très encourageants nécessitent d’être reproduits sur des cohortes plus grandes et ne permettent pas de conclure pour les situations où les patients souffrent de maladies chroniques établies. Néanmoins ils illustrent la forte propension du microbiome à pouvoir être modifié par un régime alimentaire, ouvrant des perspectives à la fois de prévention et de thérapies associant certains apports nutritionnels comme levier pouvant bénéficier aux relations hôte-système immunitaire.

*fibres alimentaires : aliments issus des parties structurantes des végétaux et qui ne peuvent pas être complètement dégradés par les enzymes digestives humaines. Dans cette étude l’apport en fibres alimentaires s’est fait sous forme de fruits, légumes, graines, noix etc.

*produits fermentés : aliments fermentés par l’action de micro-organismes (levures, champignons, bactéries, moisissures) transformant l’eau et le sucre de l’aliment soit en alcool ou en acide. Dans cette étude, seuls les aliments fermentés non alcoolisés ont été donnés aux participants (yahourt, fromage, kéfir, cottage cheese, kombucha, kimchi, légumes lactofermentés, etc.)

Sources

« Gut-microbiota targeted diets modulate human immune status » Wastyk et al. Cell 184, 4137–4153, August 5, 2021, https://doi.org/10.1016/j.cell.2021.06.019

Auteur

Emelyne Lecuyer

Emelyne Lecuyer

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